"PAPER CUT" de Yael Rasooly - Découpages et cinéma

Csm_PAPER_CUT_01_Copyright_Boaz_Zippor_a3d1bbc8eaMlle Dufracq, une secrétaire à la Betty Boop nous accueille derrière son bureau, son téléphone en bakélite et son transistor. Le noir se fait dans la salle et le rugissement du lion de la MGM retentit – apparaît alors le visage de la secrétaire.

Nous voilà transportés dans les films en noir et blanc des années 40 avec leurs lots d’idylles, de peines, d’intrigues et de suspenses. Oscillant entre la réalité d’une assistante esseulée éperdument amoureuse de son patron et du glamour du cinéma hollywoodien, Rasooly nous emporte dans son film avec des découpages de photos des magazines de l’époque et mime les scènes comme un enfant le ferait avec des petits soldats de plomb ou des poupées.

C’est loufoque, inventif, drôle et touchant. Le tout accompagné d’une scénographie réglée au millimètre et une bande son très travaillée. Rasooly manipule ses découpages, raconte (en français s’il vous plait) et chante merveilleusement.

Un délicieux moment onirique.

  

PAPER CUT
Interprète : Yael RASOOLY
Régisseur : Ran KOPILER
Directrice de prod. : Claire GIROD
Co-auteur et scénographe : Lior LERMAN 
Scénographe : Yaara NIREL
Créateur sonore : Binya RECHES
Créateur lumière : Adam YAKIN
Voix off : Maxime LE GALL


"We love Arabs" de Hillel Kogan : give peas a chance

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C'est à La Manufacture (dont la qualité de la programmation fait dire à certains qu'elle est la "in du off")  que revient le spectacle le plus prisé et médiatisé du off 2016. "We love Arabs" de Hillel Kogen avec Adi Boutros s'est joué à guichets fermés depuis le début du festival et chaque matin des dizaines de personnes ont rejoint la file dans l'espoir de dégoter une place en liste d'attente.

Dans cette pièce exaltante qu'il faut appréhender au 2e, 3e, voire au millième degré, le cynisme, l'humour et le sarcasme sont rois. 
Le sujet : un chorégraphe israélien (interprété par Kogen) veut monter un "happening chorégraphique" à la Woodstock sur la coexistence entre juifs et arabes. Il va coacher son partenaire (Adi Boutros) et commencer - pour éviter toute confusion - par bien symboliser qui est qui. L'arabe dessinera une étoile de David sur le torse de Kogen et ce dernier formera un croissant sur le front de son partenaire pour prendre conscience de la première bourde : l'Arabe est chrétien ! S'enchaîneront alors les préjugés condescendants ressassés dans les projets artistiques sur la paix et la cohabitation. On y trouve aussi par petites touches une critique de l'intellectualisation du processus chorégraphique avec des techniques aux sigles savants, comme l'inclusion dans la chorégraphie de formes géométriques ou d'objets quotidiens. C'est ainsi que des couverts entrent en scène : la fourchette dans la main de Kogen et le couteau tenu par Boutros...
Le moment de communion hilarant arrive avec le symbole du rapprochement entre ces deux peuples : le Houmous qui permet aux protagonistes d'avoir le même visage... 

Le jeu se poursuit même pendant le salut final, lorsque le chorégraphe prend sous son aile paternaliste le jeune danseur arabe et l'invite à saluer le public. 
Le spectateur sort ébloui par l'intelligence, la provocation et l'engagement du propos.
Saluons au passage l'effort de traduction en français qui ouvre l'oeuvre à un public plus large  (la pièce a été créée à l'origine en 2013 en hébreu).

Sans aucun doute un des événements marquants du #off2016

"We love Arabs" sera jouée à Paris en novembre

 

 

We Love Arabs
Texte et Chorégraphie : Hillel KOGAN
Danseurs : Adi BOUTROUS et Hillel KOGAN
Lumière : Amir CASTRO
Musique : Kazem ALSAHER, MOZART
Conseillers artistiques : Inbal YAACOBI et Rotem TASHACH
Traduction Française : Talia DE VRIES